Serre Che Glacier : l’essence du ski alpinisme

Après 23 ans d’absence, une des plus grandes courses de ski-alpinisme en binôme a fait son retour dans la vallée de la Guisane. Avec pour décor majestueux les plus hauts sommets des Écrins et en faisant le choix assumé d’un parcours sauvage, technique, long et engagé, cette première réédition a tenu toutes ses promesses !


© Nicolas Graziano

Course mythique dans les années quatre-vingt-dix, portée par des montagnards amoureux de la vallée et le bureau des guides, cette épreuve hors normes offrait déjà toute la panoplie du ski de montagne à l’état pur. Un parcours alpin et innovant, en grande partie sur glacier, alliant technicité et engagement, tout en se faufilant habilement dans ce massif somptueux au pied des Agneaux. La Serre Che Glacier renaît de ses cendres fin mars 2025 grâce au Team Hautes-Alpes, club affilié à la FFME*. Déjà bien rodée à l’organisation de l’Alpi Serre Che depuis quatre ans au mois de janvier, cette équipe de passionnés a souhaité relever le challenge et « faire quelque chose d’ampleur » dans son terrain de jeu favori, le massif des Écrins.

La commune de Monêtier-les-Bains a accueilli le projet avec enthousiasme : une manifestation sportive « nature » en haute montagne qui véhicule des valeurs correspondant bien à l’identité du village. Parmi les courses les plus exigeantes du circuit national avec ses 3 000 mètres de dénivelé, l’épreuve se court en binômes : pros et amateurs s’y côtoient. L’esprit d’équipe, c’est bien ce que les organisateurs recherchent dans ce format. « On retrouve dans la course en équipes toute l’identité et l’historique du ski alpinisme, une discipline de montagne, où l’entente de la cordée est essentielle au succès des projets », souligne David, membre du comité de course.

Marie, coordinatrice de l’épreuve, en énonce les points forts : « L’esprit se veut très “montagne”, loin des épreuves de ski alpinisme traditionnellement physiques. Il n’y a quasi plus de courses en France qui traversent des zones glaciaires. Ce nouveau format revêt un caractère exceptionnel ! Dès cette première réédition, la FFME a d’ailleurs choisi cette course comme support des championnats de France par équipe. » Samedi 29 mars à 8 h 00, le départ est donné depuis Monêtier en direction du Dôme de Monêtier via une boucle de quelque 23 kilomètres et de plus de 3 000 mètres de dénivelé.

Malgré le vent qui souffle à 80 km/h au col de la Montagnole, et grâce au travail des bénévoles qui étaient présents toute la semaine précédente pour repérer, sécuriser, baliser des variantes ou des solutions de repli, le comité d’organisation a pu offrir aux participants le plus beau des parcours en fonction des conditions.


© Nicolas Graziano

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À peine 45 minutes après le top départ, la première équipe entre dans le cœur du Parc national des Écrins, après avoir franchi le pas de l’Âne. C’est une magnifique boucle qui emmène ensuite les coureurs au seuil du Rif (3 631 m), via une redescente dans le vallon de Chambran, une remontée au col de la Cucumelle et à la Tête du Grand Pré, avant une descente finale de quelque 1 000 mètres de dénivelé pour l’arrivée sur le front de neige à Monêtier-les-Bains. Un parcours exigeant agrémenté de longues montées, de passages aériens, de descentes techniques, de nombreuses manipulations de matériel où crampons et baudriers étaient indispensables.

La beauté du parcours, ce sont les participants qui en parlent le mieux. Fatigués mais heureux, ils ne tarissent pas d’éloges sur cette édition 2025, avec souvent beaucoup d’émotion à l’arrivée : « Venus faire la course pour découvrir l’activité, mon coéquipier et moi avons vraiment vécu une super expérience. J’ai particulièrement apprécié la sécurisation optimale de l’épreuve sans suraseptisation à outrance : ils ont su garder l’esprit “montagne et autonomie”, et osé sortir du domaine skiable sécurisé. » D’autres soulignent que cette « magnifique boucle sauvage, variée, n’avait rien d’une solution de repli au vu de sa beauté et de sa longueur ».

Quant aux vainqueurs, William Bon Mardion et Xavier Gachet, champions du monde en titre, ils se font enthousiastes pour le futur : « On reviendra volontiers pour une coupe ou un championnat du monde… Il y a le terrain pour ! »


© Nicolas Graziano

La Team Hautes-Alpes, quant à elle, retiendra de cette édition l’accueil exceptionnel que lui ont réservé Serre Chevalier et le Briançonnais, « vraiment à la hauteur de ces championnats de France. Les collectivités, l’office de tourisme, le domaine skiable, les commerces, les clubs sportifs… tous ont répondu présent, en plus de nos partenaires privés, même si l’objectif reste de pouvoir fonctionner avec le maximum d’autofinancement possible », souligne Yannick, directeur de course. « C’était extrêmement touchant de sentir l’enthousiasme des partenaires dès les premières discussions, alors que nous en étions simplement au stade de l’idée. Ce soutien a été déterminant. »

Un sentiment partagé par la station de Serre Chevalier Vallée Briançon, qui s’est officiellement portée candidate pour accueillir les épreuves olympiques de ski alpinisme en 2030, désireuse de s’affirmer comme une place forte et incontournable de la discipline. « Le ski alpinisme est dans notre ADN », ajoute Jean-Marie Rey, maire du Monêtier-les-Bains et guide de haute montagne.

Rendez-vous est d’ores et déjà pris en 2027, puisque cette manifestation au parcours long et complexe nécessite une grosse logistique et mobilise de nombreux acteurs, professionnels comme bénévoles. Le choix a donc été fait de l’organiser tous les deux ans, en alternance avec La Grande Trace dans le Dévoluy, organisée également par la Team Hautes-Alpes. Une belle occasion de découvrir de nouveaux espaces et des possibilités infinies au cœur de notre département, paradis du ski de montagne.