Originaire de Briançon, Flora Dolci a choisi le ski de fond comme on choisit un mode de vie. À 26 ans, celle qui est membre de l’équipe de France évolue sur les circuits internationaux sans jamais perdre de vue ce qui l’a attirée vers cette discipline : le lien à la nature, l’endurance et la liberté. Rencontre.

Comment avez-vous découvert le ski de fond ?
Je suis née à Briançon et, comme beaucoup d’enfants du coin, j’ai été initiée aux sports d’hiver dès l’école. J’ai commencé par le ski alpin mais c’est en classe de sixième, lors d’une sortie scolaire à Cervières, que j’ai découvert le ski de fond. Ce jour-là, j’ai été marquée par l’ambiance de groupe, le goût de l’effort et ce sentiment de liberté que je ne retrouvais pas en ski alpin. Ce sport m’a révélé un autre rapport à la performance et j’ai tout de suite accroché.
Est-ce qu’il y a un lieu auquel vous êtes particulièrement attachée ?
La boucle du Casset et la vallée des Fonts de Cervières. Venir des Hautes-Alpes et être issue d’un petit club avec une philosophie saine et sans pression a façonné l’athlète que je suis aujourd’hui. À Briançon, il y a le silence, la liberté… c’est un environnement peu fréquenté et cela correspond à ma personnalité et au fait que je sois quelqu’un de discret, qui a besoin de calme et de nature. La compétition est arrivée comme une rencontre.
Quelles sont vos disciplines de prédilection ?
J’ai une préférence pour le skating et les longues distances, entre 10 et 50 kilomètres. Depuis deux ans, les femmes peuvent disputer le 50 kilomètres, comme les hommes. C’est une belle avancée. Ces courses, qui se font en départ groupé, sont très engageantes physiquement et tactiquement. À l’inverse, les 10 kilomètres se courent en contre-la-montre, ce qui demande une autre forme de gestion de l’effort et de la technique.
Comment parvenez-vous à concilier entraînements, compétitions et études ?
J’ai eu la chance de bénéficier de dispositifs adaptés. Après avoir passé mon baccalauréat aménagé sur quatre ans à Villard-de-Lans grâce au statut de sportive de haut niveau, j’ai ensuite pu suivre un BTS à l’École de management de Grenoble. Aujourd’hui, je suis en licence d’économie-gestion avec un enseignement entièrement à distance. C’est cette flexibilité qui me permet de concilier mes objectifs académiques et sportifs, sans devoir sacrifier l’un pour l’autre.
Le ski de fond est un sport éprouvant physiquement et mentalement. Comment restez-vous motivée ?
Je me concentre sur l’instant. Avec le temps, j’ai appris à relativiser. Une course peut être intense, mais si elle se passe mal, il y en aura d’autres. J’ai la chance d’évoluer et de skier dans un environnement magnifique, avec des paysages à couper le souffle, ce qui me donne envie de donner le maximum pour en profiter. J’aime relever des défis de dépassement de soi, en gardant toujours en tête que je fais ce sport par plaisir. L’adrénaline et l’effort me motivent énormément.
À quoi ressemblent vos semaines d’entraînements et vos moments de temps libre ?
L’été, nous avons des blocs de préparation physique relativement denses. En moyenne, nous faisons 90 heures de sport par mois avec des journées de deux à cinq heures, entre ski-roues, vélo, course à pied et musculation. L’accent est mis sur l’endurance. En hiver, c’est différent. Les semaines tournent autour de 15 heures d’entraînement et les week-ends sont majoritairement tous consacrés aux compétitions. En dehors des moments de préparation, je suis très attirée par la montagne, que ce soit par le parapente ou l’escalade, deux sports qui occupent beaucoup mon temps libre. Peindre m’aide aussi à me recentrer.
Vous avez eu un grave accident de parapente au mois d’octobre dernier. Comment avez-vous traversé cette épreuve, que ce soit sur le plan mental et évidemment physique ?
Mentalement, cela a été une période contrastée à l’image de montagnes russes. Mon accident est survenu à quelques mois des Jeux olympiques et lorsque l’on consacre toute sa vie à un objectif, devoir tout interrompre soudainement donne la sensation que quelque chose s’effondre. Mes blessures ont été lourdes : une vertèbre fragmentée, cinq niveaux vertébraux fixés par des vis et des tiges, le bas du dos totalement immobilisé et du cartilage arraché au niveau du pied. Les six premières semaines ont été dédiées au repos absolu où je ne pouvais rien faire physiquement. Ensuite, j’ai réappris progressivement les gestes les plus basiques en repartant de zéro. J’ai remusclé ma cheville et mon pied quand j’ai pu à nouveau marcher. Pour le dos, j’effectue des exercices très doux de posture. C’est une convalescence exigeante et éprouvante, mais j’essaie de la considérer comme une étape à part entière. Elle m’oblige à ralentir, à prendre le temps, à profiter davantage du quotidien. J’espère pouvoir retrouver la neige cet hiver, mais d’ici là j’avance petit à petit.


