Des burgers sur le toit du monde

Installé dans les cuisines de Papa Renard, à Morzine, Louis-Gautier Lepers, 35 ans, a remporté le World Burger Contest en janvier dernier. Le champion du monde ne manque pas d’idées et de créativité lorsqu’il s’agit de sublimer ses « franburgés ». Rencontre avec un palais audacieux, attaché à son territoire, qui brouille les frontières entre gastronomie et cuisine de rue.

Quand il parle de hamburgers, Louis-Gautier Lepers a les yeux qui pétillent. Pourtant, rien ne prédestinait ce passionné, originaire du nord de la France, à devenir le roi des burgers… à Morzine ! Sa carrière débute sur les bancs d’une école hôtelière belge, avant de se poursuivre dans les cuisines gastronomiques du chef Marc Meurin, à Béthune (Pas-de-Calais). « Une bonne école : j’y ai appris la rigueur et la recherche de créativité, mais je n’y voyais pas de perspective d’évolution, confie le chef. Je cherchais une cuisine plus traditionnelle. »

C’est là qu’il découvre l’univers du food-truck : « Travailler devant les gens et échanger avec eux a été un vrai coup de cœur ! » Quelques années plus tard, en 2019, Steve Marchand pense à lui lorsqu’il imagine le restaurant Papa Renard, à Morzine. Changement de vie, changement de décor pour le chef, qui signe l’intégralité de la carte de ce restaurant 100 % burgers, devenu un incontournable de la rue du Bourg. « Je suis un mordu des burgers, mais aussi de ce lieu, que nous avons pensé pour qu’on s’y sente comme à la maison. »

Refusant de choisir entre le plaisir de la street-food, plus accessible, et le raffinement des techniques de cuisine classique, il imagine une dizaine de burgers dans un style totalement hybride, qu’il assume jusque dans le terme inventé pour ses créations : les « franburgés ».

Quand le fromage sublime les burgers

Pour lui, le hamburger peut se décliner à l’infini… à condition de faire la distinction entre le burger « fast-food » et le burger travaillé. « Dans le premier cas, on se contente de cheddar classique, d’une sauce basique et de pain industriel, décrit le pro du sandwich au pain rond et moelleux. Quand on veut un burger plus typé gastronomique, on utilise des produits frais et de qualité et, surtout, on s’amuse avec des associations d’aliments, des mélanges sucrés-salés. On peut tout imaginer, à la seule condition que ce soit bon. » Et généreux !

Sur sa carte, le fromage tient une place centrale, associé à une compotée d’oignons à la framboise, des tomates cerises confites ou encore un chutney de poire et d’oignons à la bière. Le chef propose même différentes intensités de fromage au moment de choisir son burger, comme le font certains établissements avec les épices. On trouve ainsi le burger reblochon, star de l’établissement avec sa galette de fromage panée, le raclette, ou encore le fondu, riche de son effet « waouh » lors du versement du fromage en dernière minute.

L’influence de la forêt

Cette créativité assumée, mêlant origines nordistes et terre d’accueil haut-savoyarde, l’a mené jusqu’à la victoire du World Best Burger, le championnat du monde de la spécialité, en janvier dernier. Il y a présenté trois burgers, dont sa recette à la raclette, magnifiée pour l’occasion avec un pain maison bi-goût champignon-sapin, une sauce tartare à l’huile de sapin et un ketchup de champignon. Il a également marqué les esprits avec une association betterave-abondance et un burger-dessert, une tropézienne revisitée aux agrumes et à l’aneth.

« J’ai voulu raconter mon histoire, de mes origines nordistes avec le mélange betterave-abondance, au dessert en jouant sur le côté fraîcheur des vacances, en passant par mon installation à Morzine, avec des saveurs aux airs de sous-bois, raconte-t-il, inspiré par ses escapades au cœur du Chablais. C’est un cercle vicieux : je vais en forêt pour me vider la tête, mais j’y rencontre des odeurs de nature et de sous-bois qui me donnent des idées. Alors je m’amuse à transformer ces odeurs en goûts, en mettant à profit mes connaissances gastronomiques. »

Des idées qu’il griffonne dans un petit cahier. Si certaines ont déjà été testées, il en reste encore beaucoup à explorer. D’autant que l’artiste culinaire s’est récemment lancé dans un nouveau défi : délocaliser son savoir-faire hors de la cuisine ouverte de Papa Renard, en investissant événements publics ou privés à bord de son food-truck, lui aussi baptisé « Papa Renard ».

L’occasion de savourer, un peu partout, les créations de l’un des meilleurs artisans du burger au monde. À table !