Ludo May, du terrain à l’écran

Vététiste professionnel valaisan, Ludo May est passé en quelques années de compétiteur respecté à influenceur très regardé. Nous sommes allés à la rencontre de cet homme attachant, soucieux de transmettre à son tour ce que le vélo lui a apporté, dans son Val de Bagnes natal.

Ludo May a arrêté sa carrière de compétiteur en descente et enduro voici bientôt dix ans. Le vététiste bagnard de 36 ans reste pourtant toujours une référence dans ce milieu. Ses webséries Ludo et son vélo et Let’s ride engrangent des dizaines de milliers de vues sur Internet. Ses statuts d’ambassadeur de Verbier et d’athlète Patagonia lui confèrent une notoriété supplémentaire. Et son engagement dans l’association Entretrail, qui s’est fixé pour but d’entretenir les sentiers VTT, lui apporte un supplément de crédibilité.

Né en 1989, Ludo est le petit dernier d’une fratrie de trois frères. Son père est entrepreneur dans la pierre naturelle et sa mère l’assiste dans l’entreprise familiale. Le couple est sportif, mais surtout aime la nature. Leur cadet est mis en selle à l’âge de quatre ans. C’est « une révélation » qu’il ne s’explique toujours pas. « J’adorais rouler devant la maison pendant des heures. À huit ans, j’ai assisté à mes premières compétitions de descente. Cette vitesse, cette adrénaline… C’est ça que je voulais faire moi aussi ! Alors je me suis mis à improviser des coursettes entre copains entre les maisons du village », se souvient le trentenaire.

Un besoin viscéral de grand air

Déjà, il est « habité par un besoin viscéral de se dépenser en pleine nature qui [le] ressource ». Au début des années 2000, le vélo downhill (DH) est en plein boom. Le petit Ludo enregistre les courses sur son magnétoscope et les déguste en boucle. À 12 ans, il dispute ses premières compétitions de cross-country. « À l’époque, il n’y avait pas de courses de descente pour les moins de 16 ans, mais c’est dans ces portions que j’étais le plus à l’aise. J’étais têtu et motivé et j’allais m’entraîner quasiment tous les jours. » L’année 2004 marque sa première course DH à Saint-Luc. Elle est marquée par une chute, mais une place honorable en milieu de classement.

En parallèle de son apprentissage de maçon, Ludovic May poursuit sa progression. « Bosser 50 heures par semaine sur les chantiers, quel que soit le temps, m’a forgé le caractère et m’a appris qu’on n’obtient jamais rien sans effort… » À partir de 2005, le cycliste se tourne petit à petit vers l’enduro. « La descente pure durait trois à cinq minutes et exigeait une concentration totale. Les courses d’enduro, en raison de leur longueur et leur diversité de reliefs, présentaient un aspect aventureux qui me correspondait davantage encore… » Après s’être distingué plusieurs fois avec des places d’honneur sur la cultissime Mégavalanche, Ludo brille sur les épreuves de l’Enduro World Series, prestigieux circuit où il terminera 14e en 2013. L’année suivante, au sein du Canyon Factory Team, il se professionnalise davantage encore et dispose d’un manager, d’un physiothérapeute et d’un mécano. « Je vivais de ma passion et c’était un rêve ! »

L’image le pousse à « rider » autrement

En 2016, grâce à la marque BMC, le Valaisan prend un autre bon virage. Il se met à créer des contenus pour les réseaux sociaux et à escorter les journalistes sur le terrain. Peu à peu, la compétition prend moins de place dans sa vie. « J’étais un compétiteur dans l’âme, mais qui n’aurait pas tué pour gagner… Au fil du temps, je me suis même affranchi de la frustration de ne presque jamais finir premier. Je faisais de l’image depuis 2009 et cela me plaisait beaucoup. D’autant qu’une belle photo est souvent plus durable qu’un bon résultat en course… » En 2013, le réalisateur Nicolas Falquet concrétise avec lui le premier des 14 épisodes de leur série, artistique et décalée, Ludo et son vélo. « Ces films me permettent d’essayer des choses en dehors des sentiers battus et d’aller au bout d’une idée, quitte à me rendre compte en route qu’elle ne donne pas ce qu’on espérait. »

Depuis 2023, son autre série, Let’s ride, prend le contrepied du côté léché de la série de Nicolas Falquet. L’idée est d’emmener avec lui les spectateurs sur les sentiers. Ludo part avec quelques potes, des GoPro sur les casques et un drone dans le sac. « On ride et on se filme sans trop se prendre la tête ! Le vélo reste en définitive un milieu sain où l’amitié a toujours plus de valeur que l’argent », constate le cycliste, ravi. En 2023, il passe une nouvelle étape avec son documentaire Peaks of the Balkans, dont il est le héros avec son pote Jérôme Clementz, champion du monde enduro 2013. Ce premier long métrage a été à l’affiche d’une centaine de festivals et diffusé sur RTS 1.

Aujourd’hui Ludo roule toujours, sur le bikepark de Verbier « toujours super bien shapé par une équipe de pros », mais aussi et surtout dans la nature. « Notre région est unique de par ses paysages grandioses, mais aussi parce qu’on y trouve de nombreux athlètes et de grands pros de l’image. C’est une immense chance d’avoir grandi ici ! »

Un homme de valeurs

Avec son sourire doux, son regard bienveillant, sa gentillesse et son enthousiasme, Ludo May rentre à merveille dans la case « roi des bons types », une expression locale désignant les bons gars dans son genre. Lorsque nous l’avons rencontré, le Bagnard revenait d’un tournage au Rwanda. « La découverte de ce pays en 2021 a constitué pour moi un énorme déclic. Là-bas, les gens vivent l’instant présent. Ils ont si peu, mais donnent tant. Les échanges sont intenses et sincères. L’entraide communautaire tient une place importante et nous avons pu y goûter. » En Afrique, le vététiste a senti qu’il était entré dans une phase de sa vie où il avait « envie de redonner un peu de ce que le vélo lui avait apporté ». Son documentaire « rwandais », où le VTT n’est finalement qu’un prétexte, sera présenté dans les festivals dès 2026.

Depuis 2018, l’athlète donne aussi de sa personne pour Entretrail. Cette association qu’il a cofondée en 2018 fédère des bénévoles passionnés pour entretenir des sentiers VTT, mais aussi pour sensibiliser les cyclistes aux bonnes pratiques afin d’améliorer leur cohabitation avec les randonneurs et les autres usagers de la montagne. Côté vie privée, le trentenaire et sa compagne Nancy Pellissier sont en couple depuis treize ans. De leur amour, « jalousement protégé », est né un fiston, aujourd’hui âgé de trois ans, et un second est en route.